Redécouverte d'un tableau majeur de RIBERA

JOSÉ DE RIBERA DIT LO SPAGNOLETTO (1591-1652)
Saint Jérôme
signé et daté 'Jusepe de / Ribera / español /
F. 1648' (à droite, vers le centre)
huile sur toile
85,4 × 76,5 cm
Estimation: 500.000 / 800.000 €

Inconnu jusqu’alors, cette peinture de Ribera (1591-1652) représentant un saint Jérôme en médiation est un très bel ajout au corpus du peintre. Datée de l’année 1648, ce tableau présente toute la maîtrise technique d’un artiste ayant livré aux principaux foyers artistiques sa vision tourmentée du caravagisme.

Né en Espagne, Jusepe di Ribera arriva à Naples, alors province de l’empire d’Espagne, en 1616. Intégrant le milieu artistique, il fut rapidement protégé par le vice-roi Pedro TéllezGirón (1574-1624), troisième duc d’Osuna. L’aristocrate, comme son épouse, Catalina Enríquez de Ribera y Cortés Zúñiga (morte en 1635), commandèrent différentes peintures au peintre, dont certaines reprirent la route de l’Espagne diffusant plus largement l’art de l’artiste (voir la Crucifixion réalisée en 1616, collégiale de Sainte-Marie-de-l’Assomption, Osuna, Espagne). Marqué par l’art du Caravage, qui avait séjourné entre 1606 et 1607 dans la cité espagnole, Ribera se nourrissait des principes du peintre, de son goût pour les chairs marquées, et pour des compositions à mi-corps dépouillées. Les tableaux représentant saint Jérôme sont fréquents dans corpus de Ribera, on en dénombre une quarantaine.

Les différentes interprétations de ce Père fondateur de l’Église jalonnent la vie de l’artiste, qu’elles représentent le saint en pied comme dans les versions de 1626 (Saint Jérôme et l’Ange ; musée de l’Ermitage, Saint-Pétersbourg, no. inv.  -311 et Museo Capodimonte, Naples) ou dans des compositions à mi-corps comme dans la version que nous présentons (Saint Jérôme ; musée Thyssen-Bornemisza, Madrid, no. inv. 335). Ils offrent à l’artiste ces thèmes de prédilection en insufflant une passion et des expressions intenses dans ces personnages émaciés, partiellement dévêtus. Il semble que le physique décharné de notre modèle plut particulièrement à l’artiste, car l’on retrouve ce vieil homme au crâne dégarni et aux boucles grises dans au moins quatre de ses tableaux entre 1647 et 1649, citons notamment un saint Antoine anachorète de 1647 (musée Pouchkine, Moscou ; voir N. Spinosa, Ribera, Naples, 2003, p. 336, no  A282) ou bien un autre saint Jérôme de 1648 (musée du Louvre, Paris, no. inv. MNR 329). Dans un état de conservation exceptionnel, notre peinture du saint en prière révèle toute le faire du peintre, sa manière énergique dans les vigoureux empâtements de la pilosité du modèle, tout comme la subtilité de ses glacis et l’usage délicat des cernes noires autour des chairs pour renforcer l’effet de clair-obscur.